Nassour Brahim Koursami: La raison d'être d'une amnistie est de réconcilier une nation et non deux individus
Nassour Brahim Koursami: La raison d'être d'une amnistie est de réconcilier une nation et non deux individus
Suite à l'accord conclu entre le parti les transformateurs et le gouvernement Tchadien plusieurs réactions sont enregistrées. Le président du parti les patriotes Nassour Brahim Koursami donne son avis.
Suite à l'accord conclu entre le parti les transformateurs et le gouvernement Tchadien plusieurs réactions sont enregistrées. Le président du parti les patriotes Nassour Brahim Koursami donne son avis.
En tant que Tchadiens, nous nous réjouissons tous du retour d'un compatriote qui a été forcé de fuir le pays. Nous sommes tous heureux que nos frères et sœurs viennent profiter de l'amour que ce pays a à offrir, même si les conditions d'une bonne vie voire l'espoir d'une vie meilleure y sont très limités. Cependant, nous ne pouvons pas tous être sur la même longueur d’onde quant à la façon dont certains de ces retours ont été organisés ou négociés sur l'aspect qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses sur l'ensemble de la nation ou sur un bon nombre de nos compatriotes. De ce postulat, nous devons être en désaccord par obligation.
Par exemple, dans le fameux accord de Kinshasa, un article stipule que « Le Président de Transition, peut initier, au courant du mois de novembre 2023, une loi d’amnistie générale pour tous les acteurs civils et militaires impliqués dans les évènements du 20 octobre 2022 ». La première question qui laisse perplexe, est de savoir, qui a initié cette litanie de petites phrases contenues dans cet article ? Quelles sont les ramifications légales et politiques de cet article pour toutes les victimes de l'événement macabre du 20 octobre ? Est-ce le Dr. Succès Masra ou le Gouvernement de Transition qui en est à l'origine ? Sans savoir l’instigateur de ce projet, son analyse restera toujours partielle, mais notre désaccord demeure quel que soit son instigateur. Ce n’est plus un constat, mais c’est l’insouciant.
Si c'était le gouvernement, alors l'intention est claire : mettre au point l'astuce avec laquelle il veut imputer la tuerie de masse du « jeudi noir » en attribuant la responsabilité morale et historique de l'octroi d'une amnistie générale aux auteurs des événements du 20 octobre à Succès Masra. On aura très bien compris que la pratique politique a ses antinomies. Avant cet accord, le gouvernement était acculé par la pression incessante des familles des victimes, de la communauté internationale et des organisations de la société civile pour enquêter sur ces événements sanglants. M. Kaka veut éviter une telle enquête qui le rendra carrément responsable des meurtres du 20 octobre. Cet accord est considéré comme la solution miraculeuse tombée du ciel, bien qu'il appelle à une enquête complète sur la répression sanglante des manifestants. L’accord de Kinshasa, faut-il le dire honnêtement, donne également quitus au président de la République de faire adopter une loi visant à accorder une amnistie générale aux civils et militaires impliqués dans les massacres du 20 octobre 2022 dans le courant du mois de novembre. Cette contrainte de temps dans cet article montre nettement qu'il n'y a pas d'intention d'enquêter, mais de dissimuler les événements du 20 octobre en accordant une amnistie à toutes les personnes impliquées, les dédouanant de toute responsabilité criminelle. Pour quelque raison que ce soit, cet article inclus dans cet accord qui n'impose aucune obligation à quiconque autre que ses signataires, peut être utilisé comme prétexte pour permettre au gouvernement d'échapper aux pressions, d’effacer le discrédit qui pesait sur lui et de libérer son énergie et ses efforts des tentatives constantes de dissimuler des informations ou de manipuler l'opinion publique liée à ces événements tragiques.
Ainsi, le gagnant ici est le gouvernement de Kebzabo et de Kaka. Dans ce cas, Masra ne devrait pas s’inscrire dans la logique de victoire politique ou morale dans cet accord. Il devrait plutôt se blâmer pour avoir négligé ce terme ou l'avoir permis de faire partie de cet accord. Certains partisans de l'accord tentent de le maquiller sous des prétextes fallacieux en déclarant que les crimes du 20 octobre ne peuvent pas être amnistiés sans qualification, qu’ils relèvent de crimes contre l'humanité et qu'une plainte a été déposée devant la Cour pénale internationale, etc, dans une tentative de banaliser la gravité de cet article et d'inviter les gens à y prêter peu d'attention et à poursuivre la ripaille autour du retour du sauveur de la nation. Sans répondre à chacun de ces arguments, il est aberrant que certains soi-disant intellectuels prétendent que les criminels ne peuvent bénéficier d'une amnistie que si leur jugement et leur responsabilité pénale sont légalement établis. Une recherche rapide sur google permet d'établir que le parlement afghan en 2005 a adopté un projet de loi prévoyant une amnistie quasi générale pour toutes les personnes impliquées dans le conflit afghan, le Bénin en 1980 et l'Algérie en 1990. Les exemples sont non exhaustifs.
Si ces termes ont été imposés par Masra, alors je n'ai pas besoin d'analyser ses intentions. Lors de l’interview exclusive qu’il a accordée à Tchadinfos.com, il semble confirmer que la nécessité d'une amnistie généralisée pour les civils, les militaires et toutes les personnes impliquées dans les événements du 20 octobre, était son initiative et qu'il prétendait la présenter comme une concession obtenue pour ses partisans afin de leur permettre d'effacer leur casier judiciaire et de se présenter aux élections futures. Des discours raffinés et des arguments répondant aux lois de la nécessité ont pris place dans tout son dispositif. Je dirais à mon frère Masra, que certains leaders politiques ont la capacité exceptionnelle de manipuler l'opinion publique et les situations politiques à leur avantage en exploitant des questions émotionnelles ou en utilisant des tactiques de peur pour gagner des points politiques (ce qui n'est pas mon style politique), mais ici, il a lamentablement échoué. Il a donc oublié le fait que ses partisans ont été injustement et ouvertement privés de toutes les protections légales et de leurs droits, et qu'ils ont été condamnés lors de procès politiques honteux. Par conséquent, il ne peut pas demander à la même personne de les amnistier pour leur permettre de se présenter à nouveau aux élections. Le pire c'est qu’il a demandé l'amnistie à ses partisans et aux criminels aussi. Désolé, mais je ne peux pas comprendre la logique derrière son argument.
La question cruciale ici est : le droit d'être candidat pour lui et ses partisans est-il plus précieux que la justice pour toutes les victimes du 20 octobre ? La seule personne qui peut répondre à ces questions, c'est lui. Dans son interview et dans sa tentative de ne pas reconnaître l'erreur de cet accord, il a affirmé que sa signature seule ne devrait pas entraver le système judiciaire au Tchad. A quel système judiciaire fait-il référence ? Le problème avec sa signature, c'est qu'il accorde une liberté totale au gouvernement pour éviter de traiter l'ensemble des événements du 20 octobre, et non seulement pour se disculper lui-même et ses partisans. C'est pourquoi nous ne sommes pas satisfaits de l'article. Nous n'avons rien contre lui et ses projets, au contraire, nous lui souhaitons tout le meilleur dans ses aventures politiques, d'autant plus qu'il a survécu à l'exil. Il peut tranquillement prendre son bâton de pèlerinage pour un voyage vers la mangeoire (le Gouvernement d’Union Nationale). En tant que dirigeant politique, je suis préoccupé par le fait que si dans un pays, la malhonnêteté et les comportements contraires à l'éthique deviennent courants dans les méthodes de travail des dirigeants politiques, cela peut avoir de graves conséquences pour le bien-être d'une nation et de ses citoyens.
Cependant, je tiens à attirer l'attention de mes lecteurs sur le fait que l'amnistie est une décision très controversée qui ne peut pas être prise à la légère, puisque certaines conditions doivent être remplies pour qu'elle soit acceptée comme solution. Fondamentalement, une amnistie peut être accordée qu’en équilibrant le besoin de justice, celui de traduire les auteurs de crimes en justice pour les punir équitablement et mettre en lumière les événements tragiques par rapport au besoin éventuel de réconciliation et de cohésion sociale qui peut être atteint en accordant une amnistie générale. Il faut savoir arrêter la mésaventure à temps.
Dans tous les cas, cet accord reflète notre pays et notre approche de la politique qui consiste à personnaliser les affaires publiques ou l'ensemble de la gouvernance de cette nation. Nous réalisons finalement, qu'au Tchad, l’on est plongé bon gré dans un système dans lequel une question d'intérêt national est réduite au sentiment d'une seule personne. Par exemple, l'événement du 20 octobre et l'ensemble de la transition de cette nation, sont réduits à une question de ce que Mahamat Idriss Déby et Succès Masra veulent et de ce que ces deux individus revendiquent ou non l’un contre l’autre. C'est un accord qui réduit le pays à la personne de Mahamat et le parti « Les Transformateurs » à la personne de Succès. Comble de l’ironie, Mahamat se glorifie de sa capacité à tendre les mains à tous les Tchadiens exilés par son père ou lui et le sens du devoir avec lequel Masra s’est senti obligé de le remercier pour cette capacité extraordinaire et inhumaine d'oubli et de pardon.
Primo, Masra en tant qu'individu, ne devrait en aucun cas se prévaloir du droit ni du pouvoir de faire de telles concessions, à moins que les personnes décédées ne fassent toutes partie de sa famille nucléaire. Pour Mahamat, en tant que dirigeant de ce pays, sa responsabilité absolue devrait être avant tout envers les victimes et leurs familles et non pas cette manœuvre honteuse visant à gracier les criminels de leurs actes.
Secundo, dans la conscience collective, il est inadmissible que dans l'événement du 20 octobre, le parti « Les Transformateur » soit le seul parti politique à avoir appelé à la manifestation pacifique ; il y a au moins six autres partis suspendus par le gouvernement et d'autres organisations de la société civile et des individus qui ont décidé de participer à cette manifestation du 20 octobre 2022 sans être affiliés à une organisation politique. Masra a-t-il consulté toutes ces organisations et individus pour se reconnaitre dans les termes utilisés dans cet accord ? A-t-il au moins demandé aux familles des victimes si elles acceptaient de tels termes ?
En prenant les événements du 20 octobre, peut-on dire que l'octroi d'une amnistie sans enquêter sur quiconque, sans déterminer la responsabilité pénale de quiconque ou sans verser des réparations aux familles, favoriserait-il la paix et la stabilité dans ce pays ? Où sont les droits des victimes et de leurs familles ? Cela peut-il guérir la plaie béante de la société des évènements tragiques du 20 octobre ? Pouvons-nous oublier et pardonner en tant que nation ? Sommes-nous sûrs que de tels événements ne se reproduiront pas désormais ?
L'amnistie est généralement accordée dans des situations de post-conflit et non après la répression d'une manifestation pacifique devenue sanglante par un président qui n'a aucun égard pour la vie ou les droits de la population. Même si certaines personnes insistent sur les avantages d'une telle amnistie pour favoriser leur propre projet, cela peut se comprendre, car l'avidité humaine et l'égoïsme n'ont pas de limites, mais nous devons tous être conscients des conditions de base pour une amnistie, à savoir que le même crime ne se reproduira jamais et que des réparations adéquates seront versées aux familles. Accorder une amnistie sans traiter les problèmes sous-jacents peut entraver le processus de guérison et de réconciliation au sein d'une société. Elle peut aggraver les divisions et le ressentiment, au lieu de favoriser la compréhension et l'unité.
Je suggère que, pour une fois dans notre vie, nous travaillions comme un pays normal, que le président, pour son propre héritage politique et sa clarté de conscience, autorise une commission indépendante à enquêter pleinement sur les événements, même si ce n'est pas pour déterminer la responsabilité pénale (ce qui est le rôle d'un tribunal), déterminer le nombre de victimes et les circonstances de leurs décès, afin que ces familles puissent tourner la page en sachant ce qui est arrivé à leurs proches et être indemnisées pour leurs pertes, non pas pour ramener leurs proches, mais pour permettre au processus de vérité, paix et réconciliation, voire de guérison et de pardon, de pouvoir commencer et nous permettre de dire plus jamais ça, en nous réconciliant en tant que nation et non en tant qu'individus.
En tant que Tchadiens, nous nous réjouissons tous du retour d'un compatriote qui a été forcé de fuir le pays. Nous sommes tous heureux que nos frères et sœurs viennent profiter de l'amour que ce pays a à offrir, même si les conditions d'une bonne vie voire l'espoir d'une vie meilleure y sont très limités. Cependant, nous ne pouvons pas tous être sur la même longueur d’onde quant à la façon dont certains de ces retours ont été organisés ou négociés sur l'aspect qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses sur l'ensemble de la nation ou sur un bon nombre de nos compatriotes. De ce postulat, nous devons être en désaccord par obligation.
Par exemple, dans le fameux accord de Kinshasa, un article stipule que « Le Président de Transition, peut initier, au courant du mois de novembre 2023, une loi d’amnistie générale pour tous les acteurs civils et militaires impliqués dans les évènements du 20 octobre 2022 ». La première question qui laisse perplexe, est de savoir, qui a initié cette litanie de petites phrases contenues dans cet article ? Quelles sont les ramifications légales et politiques de cet article pour toutes les victimes de l'événement macabre du 20 octobre ? Est-ce le Dr. Succès Masra ou le Gouvernement de Transition qui en est à l'origine ? Sans savoir l’instigateur de ce projet, son analyse restera toujours partielle, mais notre désaccord demeure quel que soit son instigateur. Ce n’est plus un constat, mais c’est l’insouciant.
Si c'était le gouvernement, alors l'intention est claire : mettre au point l'astuce avec laquelle il veut imputer la tuerie de masse du « jeudi noir » en attribuant la responsabilité morale et historique de l'octroi d'une amnistie générale aux auteurs des événements du 20 octobre à Succès Masra. On aura très bien compris que la pratique politique a ses antinomies. Avant cet accord, le gouvernement était acculé par la pression incessante des familles des victimes, de la communauté internationale et des organisations de la société civile pour enquêter sur ces événements sanglants. M. Kaka veut éviter une telle enquête qui le rendra carrément responsable des meurtres du 20 octobre. Cet accord est considéré comme la solution miraculeuse tombée du ciel, bien qu'il appelle à une enquête complète sur la répression sanglante des manifestants. L’accord de Kinshasa, faut-il le dire honnêtement, donne également quitus au président de la République de faire adopter une loi visant à accorder une amnistie générale aux civils et militaires impliqués dans les massacres du 20 octobre 2022 dans le courant du mois de novembre. Cette contrainte de temps dans cet article montre nettement qu'il n'y a pas d'intention d'enquêter, mais de dissimuler les événements du 20 octobre en accordant une amnistie à toutes les personnes impliquées, les dédouanant de toute responsabilité criminelle. Pour quelque raison que ce soit, cet article inclus dans cet accord qui n'impose aucune obligation à quiconque autre que ses signataires, peut être utilisé comme prétexte pour permettre au gouvernement d'échapper aux pressions, d’effacer le discrédit qui pesait sur lui et de libérer son énergie et ses efforts des tentatives constantes de dissimuler des informations ou de manipuler l'opinion publique liée à ces événements tragiques.
Ainsi, le gagnant ici est le gouvernement de Kebzabo et de Kaka. Dans ce cas, Masra ne devrait pas s’inscrire dans la logique de victoire politique ou morale dans cet accord. Il devrait plutôt se blâmer pour avoir négligé ce terme ou l'avoir permis de faire partie de cet accord. Certains partisans de l'accord tentent de le maquiller sous des prétextes fallacieux en déclarant que les crimes du 20 octobre ne peuvent pas être amnistiés sans qualification, qu’ils relèvent de crimes contre l'humanité et qu'une plainte a été déposée devant la Cour pénale internationale, etc, dans une tentative de banaliser la gravité de cet article et d'inviter les gens à y prêter peu d'attention et à poursuivre la ripaille autour du retour du sauveur de la nation. Sans répondre à chacun de ces arguments, il est aberrant que certains soi-disant intellectuels prétendent que les criminels ne peuvent bénéficier d'une amnistie que si leur jugement et leur responsabilité pénale sont légalement établis. Une recherche rapide sur google permet d'établir que le parlement afghan en 2005 a adopté un projet de loi prévoyant une amnistie quasi générale pour toutes les personnes impliquées dans le conflit afghan, le Bénin en 1980 et l'Algérie en 1990. Les exemples sont non exhaustifs.
Si ces termes ont été imposés par Masra, alors je n'ai pas besoin d'analyser ses intentions. Lors de l’interview exclusive qu’il a accordée à Tchadinfos.com, il semble confirmer que la nécessité d'une amnistie généralisée pour les civils, les militaires et toutes les personnes impliquées dans les événements du 20 octobre, était son initiative et qu'il prétendait la présenter comme une concession obtenue pour ses partisans afin de leur permettre d'effacer leur casier judiciaire et de se présenter aux élections futures. Des discours raffinés et des arguments répondant aux lois de la nécessité ont pris place dans tout son dispositif. Je dirais à mon frère Masra, que certains leaders politiques ont la capacité exceptionnelle de manipuler l'opinion publique et les situations politiques à leur avantage en exploitant des questions émotionnelles ou en utilisant des tactiques de peur pour gagner des points politiques (ce qui n'est pas mon style politique), mais ici, il a lamentablement échoué. Il a donc oublié le fait que ses partisans ont été injustement et ouvertement privés de toutes les protections légales et de leurs droits, et qu'ils ont été condamnés lors de procès politiques honteux. Par conséquent, il ne peut pas demander à la même personne de les amnistier pour leur permettre de se présenter à nouveau aux élections. Le pire c'est qu’il a demandé l'amnistie à ses partisans et aux criminels aussi. Désolé, mais je ne peux pas comprendre la logique derrière son argument.
La question cruciale ici est : le droit d'être candidat pour lui et ses partisans est-il plus précieux que la justice pour toutes les victimes du 20 octobre ? La seule personne qui peut répondre à ces questions, c'est lui. Dans son interview et dans sa tentative de ne pas reconnaître l'erreur de cet accord, il a affirmé que sa signature seule ne devrait pas entraver le système judiciaire au Tchad. A quel système judiciaire fait-il référence ? Le problème avec sa signature, c'est qu'il accorde une liberté totale au gouvernement pour éviter de traiter l'ensemble des événements du 20 octobre, et non seulement pour se disculper lui-même et ses partisans. C'est pourquoi nous ne sommes pas satisfaits de l'article. Nous n'avons rien contre lui et ses projets, au contraire, nous lui souhaitons tout le meilleur dans ses aventures politiques, d'autant plus qu'il a survécu à l'exil. Il peut tranquillement prendre son bâton de pèlerinage pour un voyage vers la mangeoire (le Gouvernement d’Union Nationale). En tant que dirigeant politique, je suis préoccupé par le fait que si dans un pays, la malhonnêteté et les comportements contraires à l'éthique deviennent courants dans les méthodes de travail des dirigeants politiques, cela peut avoir de graves conséquences pour le bien-être d'une nation et de ses citoyens.
Cependant, je tiens à attirer l'attention de mes lecteurs sur le fait que l'amnistie est une décision très controversée qui ne peut pas être prise à la légère, puisque certaines conditions doivent être remplies pour qu'elle soit acceptée comme solution. Fondamentalement, une amnistie peut être accordée qu’en équilibrant le besoin de justice, celui de traduire les auteurs de crimes en justice pour les punir équitablement et mettre en lumière les événements tragiques par rapport au besoin éventuel de réconciliation et de cohésion sociale qui peut être atteint en accordant une amnistie générale. Il faut savoir arrêter la mésaventure à temps.
Dans tous les cas, cet accord reflète notre pays et notre approche de la politique qui consiste à personnaliser les affaires publiques ou l'ensemble de la gouvernance de cette nation. Nous réalisons finalement, qu'au Tchad, l’on est plongé bon gré dans un système dans lequel une question d'intérêt national est réduite au sentiment d'une seule personne. Par exemple, l'événement du 20 octobre et l'ensemble de la transition de cette nation, sont réduits à une question de ce que Mahamat Idriss Déby et Succès Masra veulent et de ce que ces deux individus revendiquent ou non l’un contre l’autre. C'est un accord qui réduit le pays à la personne de Mahamat et le parti « Les Transformateurs » à la personne de Succès. Comble de l’ironie, Mahamat se glorifie de sa capacité à tendre les mains à tous les Tchadiens exilés par son père ou lui et le sens du devoir avec lequel Masra s’est senti obligé de le remercier pour cette capacité extraordinaire et inhumaine d'oubli et de pardon.
Primo, Masra en tant qu'individu, ne devrait en aucun cas se prévaloir du droit ni du pouvoir de faire de telles concessions, à moins que les personnes décédées ne fassent toutes partie de sa famille nucléaire. Pour Mahamat, en tant que dirigeant de ce pays, sa responsabilité absolue devrait être avant tout envers les victimes et leurs familles et non pas cette manœuvre honteuse visant à gracier les criminels de leurs actes.
Secundo, dans la conscience collective, il est inadmissible que dans l'événement du 20 octobre, le parti « Les Transformateur » soit le seul parti politique à avoir appelé à la manifestation pacifique ; il y a au moins six autres partis suspendus par le gouvernement et d'autres organisations de la société civile et des individus qui ont décidé de participer à cette manifestation du 20 octobre 2022 sans être affiliés à une organisation politique. Masra a-t-il consulté toutes ces organisations et individus pour se reconnaitre dans les termes utilisés dans cet accord ? A-t-il au moins demandé aux familles des victimes si elles acceptaient de tels termes ?
En prenant les événements du 20 octobre, peut-on dire que l'octroi d'une amnistie sans enquêter sur quiconque, sans déterminer la responsabilité pénale de quiconque ou sans verser des réparations aux familles, favoriserait-il la paix et la stabilité dans ce pays ? Où sont les droits des victimes et de leurs familles ? Cela peut-il guérir la plaie béante de la société des évènements tragiques du 20 octobre ? Pouvons-nous oublier et pardonner en tant que nation ? Sommes-nous sûrs que de tels événements ne se reproduiront pas désormais ?
L'amnistie est généralement accordée dans des situations de post-conflit et non après la répression d'une manifestation pacifique devenue sanglante par un président qui n'a aucun égard pour la vie ou les droits de la population. Même si certaines personnes insistent sur les avantages d'une telle amnistie pour favoriser leur propre projet, cela peut se comprendre, car l'avidité humaine et l'égoïsme n'ont pas de limites, mais nous devons tous être conscients des conditions de base pour une amnistie, à savoir que le même crime ne se reproduira jamais et que des réparations adéquates seront versées aux familles. Accorder une amnistie sans traiter les problèmes sous-jacents peut entraver le processus de guérison et de réconciliation au sein d'une société. Elle peut aggraver les divisions et le ressentiment, au lieu de favoriser la compréhension et l'unité.
Je suggère que, pour une fois dans notre vie, nous travaillions comme un pays normal, que le président, pour son propre héritage politique et sa clarté de conscience, autorise une commission indépendante à enquêter pleinement sur les événements, même si ce n'est pas pour déterminer la responsabilité pénale (ce qui est le rôle d'un tribunal), déterminer le nombre de victimes et les circonstances de leurs décès, afin que ces familles puissent tourner la page en sachant ce qui est arrivé à leurs proches et être indemnisées pour leurs pertes, non pas pour ramener leurs proches, mais pour permettre au processus de vérité, paix et réconciliation, voire de guérison et de pardon, de pouvoir commencer et nous permettre de dire plus jamais ça, en nous réconciliant en tant que nation et non en tant qu'individus.